Entre les Jeux olympiques et la coupe du monde de football, quel est l’événement à la plus grande audience ? Le football est sans conteste le sport le plus populaire et le sujet de débat universel. Pour faire honneur à notre nom, réfléchissons à la place qui revient au football dans nos priorités.
XAVI, l’actuel champion du monde des sélections nationales et des clubs avec 25 titres officiels remportés, est le plus grand lauréat de tous les footballeurs espagnols.
Sensé, croyant, grand philanthrope, il dit souvent que son équipe « le Barça, en Catalogne, est une religion ».
Selon Kobe Bryant « « voir les amateurs arriver au stade et démontrer leur loyauté envers leur équipe, ou à leur pays, […] cela n’arrive dans la NBA que lors des playoffs et des finales. Le football est différent. C’est davantage comme une religion » […]. Le gardien des Lakers, [qui] a vécu [durant] son enfance en Italie [et y a] joué [au] football, a affirmé : « Le fait d’avoir grandi en Italie m’a donné une expérience de première main quant à l’amour intense pour le football qu’ont les amateurs depuis très jeunes. Et je puis vous garantir que c’est unique » ».
Notre Ecosystème émotionnel
Dans la première partie de son œuvre posthume, Fûtbol, una religion en busca de un dios [Le Football, une religion à la recherche d’un dieu], Manuel Vâzquez Montalbân (Barcelone, 1939 – Bangkok, 2003) tente d’expliquer « la raison de notre passion, parfois irrationnelle, pour un sport qui donne une expérience religieuse indispensable à notre écosystème émotionnel ».
Salomon nous dit que le Créateur « a implanté au tréfonds de l’être humain le sens de l’éternité » (Ecclésiastes 3.11, SEM). Ainsi, il n’est pas étrange qu’un millénaire plus tard, Augustin d’Hippone ait écrit dans ses Confessions : « Tu nous as faits pour Toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu’il ne repose en Toi ». Et, quand l’être humain ne trouve pas Dieu ou – pour mieux dire – ne se laisse pas trouver par lui, il comble le vide qui se trouve au plus profond de son être avec n’importe quelle idole qui puisse l’émouvoir, mais qui ne l’engage à rien.
Pour ou Contre
En commentant le livre de Vâzquez Montalbân, Juan Antonio Monroy, l’illustre leader protestant espagnol, affirme que le football est « une religion qui déséquilibre la stabilité familiale, fanatise les individus depuis l’adolescence jusqu’à la vieillesse. On en parle du lundi au samedi, au travail et dans les lieux publics, sur un ton qui diffère selon les résultats du match du dimanche et ce, du lundi suivant au samedi de la même semaine ».
Xavi, qui se considère chrétien mais qui est un footballeur et non un pasteur comme Monroy, a écrit quelque chose de diamétralement opposé : « Le perfectionnement sportif requiert la pratique des vertus que le christianisme a toujours valorisées : la tempérance, la prudence, la constance, le travail […]. Le sérieux avec lequel un sportif doit prendre soin de son corps a aussi un contenu moral […]. Le sportif doit respecter son corps […], mais respecter n’est pas la même chose qu’idolâtrer. […] En plus de promouvoir les vertus individuelles, le sport est une école de vertus sociales. Le sportif doit dépasser toutes les frictions personnelles de la cohabitation et faire passer le succès collectif et l’intérêt commun avant tout. Un tel esprit demande de la solidarité, de la coordination, du dévouement envers la collectivité et le sacrifice du prestige personnel. Passer le ballon au coéquipier en meilleure position au lieu de le négocier individuellement. Se sacrifier dans le travail discret ou lucide. Accepter patiemment d’être remplacé, ou rester sur le banc quand un autre coéquipier est en meilleure forme. Encourager le coéquipier blessé […]. Tout cela contribue à forger le caractère […]. On apprend aussi à respecter l’adversaire. […] Lors de la sélection, nous avons fraternisé avec des joueurs d’équipes qualifiées d’« éternelles rivales ». Il s’agit aussi d’une grande expérience humaine et chrétienne ».
Religion de fanatiques
Pour Eduardo Galeano, l’écrivain uruguayen, « dans sa vie, un homme peut changer de femme, de parti politique ou de religion, mais ne peut changer d’équipe de football ». Si pour Kobe Bryant le football est comparable à une religion, il est pour Galeano plus que cela.
Dans le monde du football, il y a des croyants et des non-croyants, des pratiquants et des non-pratiquants, des membres ou de simples sympathisants. Il y a aussi des tolérants et des intolérants. Des modérés et… des fanatiques ! Dans le territoire de distribution de cette revue en espagnol, on qualifie de fanatique tous les partisans d’une équipe et tous les amateurs en général sont qualifiés de « fanatiques ». Le football est donc une « religion » de fanatiques, c’est à dire, de croyants aveuglés qui ne veulent pas entendre raison.
L’idolâtrie du football a atteint de tels extrêmes qu’on ovationne les « idoles » – c’est bien le cas de le dire – en scandant leur nom, en levant les bras et en s’inclinent en signe d’adoration. De même qu’en jouant avec le nom de celui que l’on considère comme le meilleur joueur du moment, on parle de « messianisme ».
Mais, pire encore, on parle encore de celui qui a été, à son époque, le meilleur au monde sur le terrain et qui a pris sa retraite, il y de cela maintenant plus de quinze ans, comme étant « la main de Dieu »… Une main qui, pour avoir marqué un but de toute évidence illégal, lors de la finale d’un championnat mondial, n’est précisément pas digne d’éloges. Et certaines personnes, que nous pourrions qualifier de fanatiques dans le sens le plus négatif du terme, ont fait de ce personnage si moralement peu recommandable dans sa vie privée un dieu au point que, depuis 1988, il existe une Église maradonienne avec son décalogue, son credo et, bien sûr, ses croyants et ses adorateurs.
La Bible et le sport
Le sport, en tant qu’activité qui ne soit pas en lien avec le travail productif, mais comme spectacle de masses n’existait pas dans la société de l’Ancien Testament, mais dans celle du Nouveau. L’apôtre Paul a su tirer de bonnes leçons des courses à pied, ou même de l’entraînement à la lutte. « Ne savez-vous pas que ceux qui courent dans le stade courent tous, mais qu’un seul reçoit le Prix ? Courez de manière à l’obtenir. Tout lutteur s’impose toute espèce d’abstinences ; eux, pour recevoir une couronne corruptible, nous, pour une couronne incorruptible. Moi donc, je cours, mais non pas à l’aventure ; je donne des coups de poing, mais non pour battre l’air. » (1 Corinthiens 9.24-26)
Ce même apôtre a conseillé son jeune disciple Timothée en ces termes : « Mais repousse les fables profanes, contes de vieilles femmes. Exerce-toi à la piété ; car l’exercice corporel est utile à peu de choses, tandis que la piété est utile à tout, elle a la promesse de la vie présente et de la vie à venir. C’est une parole certaine et digne d’être entièrement reçue » (1 Corinthiens 4.7-9). Le prix qui nous est réservé à tous quand nous atteindrons le but est éternel et infiniment supérieur à toutes les gloires sportives ou autres qu’on puisse gagner sur cette terre. C’est pourquoi Paul nous dit : « Ce n’est pas que j’aie déjà remporté le prix ou que j’aie déjà atteint la perfection ; mais je poursuis ma course afin de le saisir, puisque moi aussi, j’ai été saisi par le Christ-Jésus. Frères, pour moi-même je n’estime pas encore avoir saisi le prix ; mais je fais une chose : oubliant ce qui est en arrière et tendant vers ce qui est en avant, je cours vers le but pour obtenir le prix de la vocation céleste de Dieu en Christ-Jésus. » (Philippiens 3.12-14)
En guise de conclusion
Pour tout dire, nous voyons que le sport en soi n’est ni bon, ni mauvais, mais tout le contraire. Ceux qui le rendent bon ou mauvais sont nous ses partisans. Pire encore sont ceux qui font de leur fauteuil leur unique activité sportive et qui, accompagné de sa ration traditionnelle d’alcool, devient le sport le plus pratiqué devant le téléviseur.
Rappelons-nous que le premier des dix commandements est « Tu n’adoreras pas d’autres dieux que moi » et que le second commence ainsi : « Tu ne te fabriqueras aucune idole » (Exode 20.3, 4, BEC). Si les dieux sont dangereux, les idoles le sont davantage et si les idoles sont quelque chose de ridicule, celles qui sont vivantes, en chair et en os le sont encore plus.
Prenons donc du sport les bons exemples et évitons les mauvais qui l’entourent comme le commerce et le spectacle qui glorifient la violence. Luttons donc de façon sportive, sans tendre de pièges, en respectant et en encourageant les autres car, dans ce jeu, ou course de la vie – celle qui est éternelle – la récompense est plus grande que toutes celles qu’on ne pourra jamais recevoir.
C’est pourquoi c’est avec une pleine assurance qu’on peut dire de la course chrétienne que le plus important n’est pas de gagner, mais de participer… et de l’achever, car la victoire est à la portée de tous !
Francesc X. Gelabert
Extrait de la Revue Priorité 2014