Parmi les fêtes que célébraient les Israélites, la Pâque tenait une place de choix. Ses origines remontent à la veille du jour mémorable où le peuple hébreu avait été délivré de la servitude du pays d’Egypte. Après qu’il eut refusé obstinément d’obéir à la parole de l’Eternel qui ordonnait de libérer les enfants d’Israël, Pharaon, roi d’Egypte, allait recevoir un premier avertissement par l’intermédiaire de Moïse : « Tu diras au Pharaon : ainsi parle l’Eternel : Israël est mon fils, mon premier-né. Je te dis : Laisse partir mon fils, pour qu’il me serve ; si tu refuses de le laisser partir, alors moi, je ferai périr ton fils, ton premier-né. » (Exode 4:22,23.)
A quoi devait s ajouter cette terrible prophétie :« voici ce qu a dit l’Eternel : Vers le milieu de la nuit, je m’avancerai dans l’intérieur de l’Egypte; et tous les premiers-nés vont mourir dans le pays d’Egypte, depuis le premier-né du Pharaon assis sur son trône jusqu’au premier-né de la servante gui travaille aux meules, et tous les premiers-nés du bétail. Il y aura de grands cris dans tout le pays d’Egypte, tels qu’il n’y en a jamais eu et qu’il n’y en aura jamais.» (Exode 11: 4-6.) Et Moïse poursuivit en disant : « Mais chez les Israélites, pas même un chien n’aboiera, ni contre un homme, ni contre une bête.» (Verset 7.)
« Avant l’exécution de cette menace, Dieu fit donner à Israël, par Moïse, des instructions relatives au départ de l’Egypte, surtout sur la manière de se préserver du prochain fléau. Chaque famille devait immoler un agneau ou un chevreau sans défaut et le manger, seule ou réunie à une famille voisine. En outre, au moyen d’un bouquet d’hysope trempé dans le sang de l’animal, il fallait asperger le montant et les deux linteaux de la porte, afin que le Destructeur, qui allait passer à minuit, n’entra pas dans la maison ». La chair de l’animal devait être rôtie au feu », mangée durant la nuit, avec des pains sans levain et des herbes amères, et cela a la hâte, les reins ceints, les sandales aux pieds, et le bâton à la main ». C’était, disait Moïse, la Pâque de l’Eternel ».
L’Eternel avait dit : « Cette nuit-là, je passerai dans le pays d’Egypte; je frapperai tous les premiers-nés dans ce pays, depuis les hommes jusqu’aux animaux. J’exécuterai mes jugements contre tous les dieux de l’Egypte. Je suis l’Eternel. Le sang sur les maisons où vous habitez vous servira de signe ; je verrai le sang et je passerai outre, et le fléau destructeur ne vous atteindra point, lorsque je frapperai le pays d’Egypte. »
Dans toutes les générations futures, en commémoration de cette grande délivrance, les Israélites devaient célébrer chaque année une fêle à l’Eternel, et à cette occasion réciter à leurs enfants l’histoire du passage du Destructeur par-dessus les maisons des Israélites, en Egypte, lorsqu’il frappa les Egyptiens, et qu’il préserva nos maisons ». »
La Pâque devait être une fête à la fois commémorative et préfiguratrive. Non seulement elle rappelait la délivrance de la servitude égyptienne, mais elle préfigurait la suprême délivrance que Jésus devait apporter au monde. L’agneau du sacrifice représentait l’Agneau de Dieu, notre unique espérance de salut. Par son immolation, dit l’apôtre Paul, le Christ est devenu « notre Pâque « . Mais il ne suffisait pas que l’agneau pascal fût immolé ; il fallait que son sang fût aspergé sur les poteaux de la porte. C’est ainsi que les mérites du Sauveur sont imputés aux âmes croyantes. Jésus a non seulement donné sa vie pour le monde, mais pour, chacun individuellement, à condition qu’il s’approprie les vertus de son sacrifice expiatoire.
« Les herbes amères qui devaient, au repas pascal, accompagner la chair de l’agneau, avaient pour but de rappeler l’amertume de la servitude égyptienne. Ainsi la participation au corps du Seigneur doit s’accompagner d’un douloureux regret de nos péchés. Les pains sans levain renfermaient également un enseignement. La loi pascale prescrivait expressément qu’il ne devait y avoir aucun levain dans les maisons pendant toute la durée de la fête, ordonnance à laquelle les Juifs se sont strictement conformés. Il faut, de même, que ceux qui désirent recevoir de Jésus l’aliment et la vie de leur âme, se séparent de tout levain de péché. L’apôtre Paul en parle en ces ter mes aux fidèles de Corinthe : « Purifiez-vous du vieux levain, afin que vous deveniez une pâte nouvelle et sans levain, comme vous l’êtes aussi ; car Christ, notre Pâque, a été immolé. Ainsi donc célébrons la fête, non avec le vieux levain, ni avec un levain de malice et de méchanceté, mais avec les pains sans levain de la sincérité et de la vérité. » —
Dans le Nouveau Testament, la Pâque trouve sa contrepartie dans le service de sainte Cène. Une fois que le Christ, véritable Agneau de Dieu, fut venu mourir ici-bas, il devint tout à fait inutile d’immoler l’agneau pascal qui préfigurait son sacrifice. Mais il était nécessaire de commémorer la mort de Jésus sur la croix et d’évoquer la puissance qui en découle. C’est pourquoi le Seigneur a institué la communion au pain et au vin pour rappeler l’événement capital sur lequel repose notre salut et les bienfaits spirituels que le sacrifice du Calvaire met à notre disposition. La Sainte Cène oriente la pensée des chrétiens vers le passé envers l’avenir : « Car toutes les fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe, vous annoncez la mort du Seigneur, jusqu’à ce qu’il vienne. » (1 Corinthiens 11 : 26.)
Evoquant le dernier repas pascal que Jésus prit avec ses disciples, l’apôtre Jean écrit : « Avant la fête de Pâque, sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde au Père, Jésus, qui avait aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu’au bout.
Pendant le repas, alors que le diable avait déjà mis au cœur de Judas, fils de Simon, de le livrer, Jésus, qui savait que le Père avait tout remis entre ses mains, qu’il était venu de Dieu et qu’il s’en allait à Dieu, se leva de table, ôta ses vêtements et prit un linge dont il s’entoura. Ensuite il versa de l’eau dans un bassin et se mit à laver les pieds des disciples et à les essuyer avec le linge qu’il avait à la ceinture, « (Jean 13 : 1-5.)
La préparation à la sainte Cène
Le service de l’ablution des pieds n’a de sens que dans la mesure où il signifie l’affranchissement du péché par le repentir et la confession. Il symbolise la purification du péché et une consécration nouvelle pour un service désintéressé. Cette cérémonie illustre également l’esprit de solidarité qui doit présider aux relations entre chrétiens. Or cet esprit faisait cruellement défaut parmi les disciples de Jésus, dont l’évangile nous dit : Il s’éleva aussi parmi eux une contestation ; lequel d’entre eux devait être estimé le plus grand ? » (Luc 22 ; 24.) Le lavement des pieds était donc une bonne préparation au repas du Seigneur. L’orgueil la jalousie, les discordes qui régnaient entre eux devaient disparaître.
Après qu’il leur eut lavé les pieds, Jésus se remit à la table où se trouvaient levain et le vin disposés d’après les instructions qu’il avait données à ses disciples. « Ensuite, il prit du pain ; et après avoir rendu grâces, il le rompit et le leur donna en disant : Ceci est mon corps, qui est donné pour vous; faites ceci en mémoire de moi. De même il prit la coupe, après le repas, et la leur donna, en disant : Cette coupe est la nouvelle alliance en mon sang, qui est répandu pour vous, » {Luc 22 : 19, 20.)
C’est ainsi que le Sauveur institua le service de sainte Cène destiné à rappeler à ses disciples les scènes émouvantes qui marquèrent la trahison dont il fut l’objet et sa crucifixion pour les péchés du monde. Le pain rompu et distribué aux apôtres représentait le corps du Christ brisé par les souffrances de la croix et offert à l’humanité pour le salut des pécheurs. Le vin était une image de son sang versé pour la purification des péchés de tous ceux qui viendraient à lui afin d’être pardonnes et de le reconnaître comme leur Sauveur. Cette cérémonie solennelle commémore donc un événement beaucoup glus important que la délivrance d’Israël du pays d’Egypte. En fait, cette délivrance était seulement la préfiguration de celle que le Christ devait obtenir par le sacrifice de sa propre vie à Golgotha.
L’évangile selon Matthieu nous dit qu’« après avoir chanté les psaumes, ils [les disciples] se rendirent au mont des Oliviers » (Matthieu 26 : 30).
Jésus avait eu, avec ses disciples, une conversation animée ; cependant, à mesure qu’ils s’approchaient de Gethsémané, son attitude devenait étrangement silencieuse. Souvent il était venu méditer et prier là. En cette nuit où devait avoir lieu sa dernière agonie, il éprouvait une douleur qu’il n’avait jamais ressentie. Durant toute sa vie terrestre, il avait marché dans la lumière de la présence divine. Alors qu’il se trouvait en conflit avec des hommes qui inspirait l’esprit de Satan, il pouvait dire : « Celui qui m a envoyé est avec moi ; il ne m a pas laissé seul, parce que je fais toujours ce qui lui est agréable. « Mais cette fois il paraissait privé de la présence réconfortante de la lumière divine. Il était maintenant compté parmi les transgresseurs. Il lui fallait porter le poids de la culpabilité de l’humanité déchue. L’iniquité de nous tous devait reposer sur celui qui n’avait pas connu le péché. Le péché lui paraît si redoutable, le fardeau de la faute est si lourd, qu’il a lieu de craindre de se trouver, pour toujours, privé de l’amour de son Père. Sachant quelle aversion Dieu éprouve pour le péché, il s’écrie : « Mon âme est triste jusqu’à la mort. »
A mesure qu’il avançait, cette angoisse augmentait. Il chancelait comme s’il allait tomber. Les disciples cherchèrent au jardin l’endroit où il avait coutume de se retirer, pensant que le Maître pourrait s’y reposer…. Par deux fois ses compagnons durent le soutenir, sans quoi il se serait écroulé sur le sol. …
Il s’éloigna à quelque distance — pas si loin qu’ils ne pussent le voir et l’entendre — et tomba à genoux. Il sentait que le péché le séparait de son Père. L’abîme était si large, si noir, si profond, que son esprit frissonnait….
La froide rosée tombe sur son corps prosterné sans qu’il y prête attention. De ses lèvres pâles jaillit ce cri plein d’amertume : « Mon Père, s’il est possible, que cette coupe s’éloigne de moi ! » Cependant il ajoute immédiatement : Toutefois, non pas comme je veux, mais comme tu veux. —
Tandis que le Christ et ses disciples se trouvaient encore dans le jardin de Gethsémané, Judas, l’un des Douze, survint à la tête d’une troupe d’hommes envoyés par les principaux sacrificateurs, les scribes et les anciens, afin de l’arrêter. Jésus fut conduit d’un tribunal à l’autre et interrogé; mais aucune des accusations proférées contre lui ne put établir sa culpabilité. «Pilate voulut satisfaire la foule et leur relâcha Barrabas; et après avoir fait battre Jésus de verges, il le livra pour être crucifié.» (Marc 15 : 15.)
On plaça sur ses épaules, meurtries et saignantes, la croix qui avait été préparée pour Barrabas. … La foule qui suivait le Sauveur le vit chanceler, sans éprouver la moindre compassion. Elle se moqua du fait qu’il ne pouvait porter cette lourde croix. —
Lorsqu’ils furent arrivés au lieu appelé le Crâne, ils le crucifièrent là. » (Luc 23 : 33.) « Le Sauveur ne fait entendre aucun murmure. Son visage reste calme et serein, mais de grosses gouttes de sueur emperlent son front. Pas une main secourable pour essuyer la sueur mortelle de son visage, pas une parole de sympathie et d’attachement inébranlable ne vient réconforter son cœur humain. Pendant que les soldats accomplissent leur besogne barbare, Jésus prie pour ses ennemis : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font.
Dès que Jésus est cloué à la croix, des hommes robustes se saisissent de celle-ci, la dressent, la plantent brutalement à l’endroit qui a été préparé et le Fils de Dieu en éprouve une excessive souffrance. —
Tout à coup l’obscurité qui enveloppait la croix se dissipa, et Jésus s’écria, d’une voix claire et retentissante : « Tout est accompli, » ..Père, je remets mon esprit entre tes mains. » Une lumière enveloppa la croix, et le visage du Sauveur resplendit comme le soleil. Sa tête retomba.sur sa poitrine, et il expira. » —
En s’abaissant jusqu’à revêtir notre humanité, le Christ a manifesté un caractère opposé à celui de Satan. Mais il est descendu encore plus bas sur le sentier de l’humiliation. « Après s’être trouvé dans la situation d’un homme, il s’est abaissé lui-même en devenant obéissant jusqu’à la mort, la mort de la croix. » Tel le souverain sacrificateur qui déposait son riche vêtement pontifical pour officier dans l’habit de lin du simple sacrificateur, le Christ a pris la forme de serviteur et a offert son sacrifice, à la fois sacrificateur et victime. « Il a été meurtri à cause de nos péchés, brisé à cause de nos iniquités. Le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui. »
Le Christ a été traité selon nos mérites afin que nous •puissions être traités selon ses mérites. Il â été condamné pour ‘.nos péchés, auxquels il n’avait pas participé, afin que nous puissions être justifiés par sa justice, à laquelle nous n’avions pas participé. Il a souffert la mort qui était la notre, afin que nous puissions recevoir la vie qui est la sienne ». C’est par ses meurtrissures que nous avons la guérison. —
Par sa vie, Jésus-Christ notre Sauveur a donc appris ce que signifie être haï, injurié et rejeté.
La mort du Christ sur la croix fournissait la garantie que celui qui avait la puissance de la mort et était l’instigateur du péché serait détruit. Quand Satan sera éliminé, il n’y aura plus personne pour inciter au mal; l’expiation n’aura plus jamais besoin d’être renouvelée, et le danger d’une autre rébellion dans l’univers de Dieu aura disparu…. Sans l’Agneau immolé depuis la fondation du monde, les hommes déchus n’auraient pu avoir accès au paradis de Dieu. Aussi, comment pourrions-nous ne pas exalter la croix du Christ?… Le don de Dieu manifesté en la personne de son Fils bien-aimé fut l’expression d’un amour insondable. Dieu a atteint par là l’extrême limite de ce qu’il pouvait faire pour sauvegarder l’autorité de sa loi tout en sauvant le transgresseur…. Notre seul espoir réside dans une confiance pleine et entière dans le sang de celui qui peut sauver parfaitement ceux qui s’approchent de Dieu par lui. La mort du Christ est notre unique espérance dans ce monde et il sera notre thème de réflexion dans le monde à venir. …
Au travers de la croix, nous comprenons que notre Père céleste nous aime d’un amour infini et éternel, et qu’il peut nous attirer à lui mieux que ne saurait le faire la tendresse d’une mère pour son enfant égaré. Pourquoi nous étonner que Paul déclare : « Je ne me glorifierai de rien d’autre que de la croix de notre Seigneur Jésus-Christ »? Il nous appartient aussi de nous glorifier de la croix du Calvaire et de nous donner nous-mêmes entièrement à celui qui s’est donné lui-même pour nous. Alors, grâce à la lumière de l’amour qui rayonne de sa face et se réfléchit sur notre visage, nous irons apporter la lumière à ceux qui sont dans les ténèbres.
Pasteur P.M. Mabena
Extrait d’une Revue
Adventiste de 1980